« Chaque soir, avant de s’endormir, Alfie Summerfield s’efforçait se remémorer à quoi ressemblait sa vie avant le début de la guerre. Plus le temps passait et plus il avait de mal à garder ses souvenirs intacts.
Les combats avaient commencé le 28 juillet 1914. Certains pourraient ne pas se rappeler cette date avec autant de précision, mais Alfie, lui, ne l’oublierait jamais. C’était le jour de son anniversaire. Il avait cinq ans. » Avoir cinq ans dans un quartier populaire de Londres, en 1914, cela veut dire recevoir quelques menus cadeaux, mais s’entendre dire que, oui, l’on est encore trop jeune pour aider son papa dans sa tournée de laitier. N’ayant pas les yeux dans sa poche, le petit bonhomme connaît déjà tous ses voisins de Damley Road. Une rue où solidarité et ragots font bon ménage, où l’entraide vient de là où on ne l’attend plus, une rue qui va être au cœur du roman, tout autant que cette longue guerre – dont on ne sait pas à quel Noël elle finira. Et puis Alfie va grandir à la va comme je te pousse, jusqu’à comprendre que son père, loin d’être « en mission secrète » est frappé de « psychose traumatique ». Et notre bonhomme de neuf ans d’organiser, son Robinson Crusoë sous le bras, une expédition pour le sortir de l’hôpital. Plus qu’une simple bienveillance, c’est une complicité de chaque instant qui lie dans ce roman le narrateur à son héros en culottes courtes ; une connivence qui lui permet de surmonter les horreurs vécues par les grandes personnes. Et qui aidera les jeunes lecteurs à tourner la dernière page du roman sur une note optimiste : parce que cette aventure, Alfie s’y est embarqué « pour la meilleure raison du monde, par amour ».
Dès 10 ans
John Boyne, Mon père est parti à la guerre, Gallimard Jeunesse, 2014, 288 p., 12,90 € — En poche, 2016, 256 p., 6,90 €