« Jeudi 7 janvier 1915
Ma chère Marie,
Comment te remercier pour le colis que tu m’as envoyé comme étrennes ? Je t’assure que cela améliore bien mon ordinaire et celui des copains, mais j’espère que tu ne te prives pas trop pour moi. […] Pour l’instant, nous sommes occupés à renforcer notre défense. Cette nuit, comme les précédentes, nous allons tendre des barbelés devant nos positions. Crois-moi que ce n’est pas facile dans la nuit noire. »
Voici ce que Rémi, fantassin au 63e d’Infanterie, écrit à Marie, sa jeune épouse restée à la ferme. Une lettre parmi tant d’autres, pieusement conservées par Marie, et découvertes, un beau jour de l’été 1965, par sa petite-fille Sophie. Ce secret, Grand-Mère Marie l’avait gardé enfoui au fond de son cœur, car Rémi n’était jamais revenu. Tombé au champ d’honneur le 5 mai 1915. Quelques années plus tard, la jeune veuve avait épousé Jean-Baptiste, le très pieux ami de régiment de son défunt mari.
Au cœur du roman, donc, une série de lettres écrites par un Poilu depuis le front, où alternent périodes de combat et de repos. Au-delà de cette description de la guerre, lettres et confidences vont lier la jeune adolescente et sa grand-mère, tant il est vrai que la transmission de la mémoire est, dans les familles, affaire de femmes.
Véronique Duchâteau évoque aussi dans ce roman le culte du Sacré-Cœur. Ce « petit cœur rouge », symbole de leur foi, les soldats, dans les tranchées, le sculptaient dans des douilles d’obus ou le cousaient sur le revers de leur capote.
Ce roman à « double entrée », très fin, ne transige pas sur la réalité historique et montre bien la répercussion qu’eut ce conflit sur la vie quotidienne des familles.
Dès 11 ans
Véronique Duchâteau, Le Petit Cœur rouge, Artège Editions, 160 p., 10, 90 €